Cote d’Ivoire : Vers la condamnation de l’Etat ivoirien pour une affaire mal ficelée par l’Ageroute

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 Abidjan le 16 Mars 2025 – Dans ce document intitulé A191/NI/DAN/02/25 qui est une conclusion en réplique pour le compte de l’AGEROUTE, la Défenderesse portée par le conseil du cabinet SCPA KAKOU-DOUMBIA-NIANG &ASSOCIES contre le Sieur HAIDAR Hussein, demandeur, Maitre Claude GNEBA, avocat à la Cour du Tribunal d’Abidjan-Plateau plaide ainsi devant le Juge des référés :

« Attendu que par assignation du 30 Janvier 2025, le Sieur HAIDAR Hussein a attrait I’AGEROUTE par-devant la juridiction de céans à l’effet d’entendre:

《-Constater que Monsieur HAIDAR Hussein est le propriétaire des bâtiments érigés sur le lot numéro 5613 ilot 4999 d’une superficie de 417 m2 et du lot 1008, ilot 130 d’une superficie de 134,42 m2 de la circonscription foncière de Yopougon-Gesco et qu’il s’est fait recenser dans le cadre de la procédure d’indemnisation;

Constater que Monsieur HAIDAR HUSSEIN n’a perçu aucune indemnisation suite à la destruction de ses bâtiments et qu’aucun accord n’a été formalisé avec la puissance publique pour son indemnisation ;

Homologuer le rapport d’expertise du Cabinet AHOUTI EXPERTISE en date du (06/04/2021);

Fixer le montant de I’indemnité à la somme de

Faire injonction à I’AGEROUTE PTUA et I’ETAT de Cote d’Ivoire à payer à

Monsieur HAIDAR Hussein la somme de à titre d’indemnité d’expropriation》; a tort cependant, eu égard aux développements qui suivent.

I- LES FAITS

Attendu que pour les besoins du projet du dédoublement de la sortie Ouest d’Abidjan, Route de Dabou, I’Etat de Côte d’Ivoire a déclaré d’utilité publique des périmètres devant être impactés par cette mesure d’envergure;

Que les détenteurs de droits afférents à ces périmètres devaient évidemment être dédommagés de cette expropriation pour cause d’utilité publique;

Attendu que le Sieur HAIDAR Hussein a été recensé entre autres, s’agissant des biens identifiés:

-PDRD/Y-GES 1/0018,

-et PDRD/Y-GES 1/0002;

Que la valeur desdits biens, après expertise du Cabinet requis par I’Etat, a été évaluée à X Fcfa et Y Fcfa; (Pièces 1 et 2)

Attendu que contre toute attente, le sieur HAIDAR Hussein a formulé une plainte auprès du Bureau des Plaintes pour contester ces montants ;

Que cependant, le Sieur HAIDAR Hussein a disparu, pour ne plus se manifester, de sorte que la concluante et I‘État de Côte d’Ivoire n’ont guère été en mesure d’instruire sa contestation

Qu’il a cependant continué d’être tenu à sa disposition, les montants déterminés par l’Expert régulièrement sélectionné par l’Etat de Côte d’Ivoire ;

Que cette absence longue et inexpliquée du Sieur HAIDAR, ralentissant gravement la réalisation de l’ouvrage public projeté par I’État, la concluante n’a eu de choix que de disposer ainsi qu’elle la fait pour honorer ses engagements dans l’intérêt public et vis-à-vis de ses Partenaires Institutionnels Internationaux ;

Que c’est seulement le 28 novembre 2023, alors que les travaux étaient largement entamés pour être sur le point d’être achevés, que le sieur HAIDAR Hussein s’est manifesté, prétendant vouloir poursuivre la transaction, mais en excipant cependant d’un rapport d’expertise immobilière qui fixerait ses prétentions à la somme de Fcfa

Qu’une telle prétention, irréaliste, sera purement et simplement rejetée, tout comme l’ensemble des prétentions formulées par le Sieur HAIDAR à l’occasion de la présente procédure;

II- DISCUSSION: DU REJET DES PRETENTIONS DU SIEUR HAIDAR

HUSSEIN

Attendu qu’il est incontestable que le Sieur HAIDAR Hussein, alors qu’il devait transiger avec I’Etat de Côte d’Ivoire pour l’indemnisation de ses biens immobiliers impactés par le projet de dédoublement de la Route de Dabou, a disparu; Paralysant ainsi I’Etat de Côte d’Ivoire dans son projet de réalisation d’un ouvrage d’utilité publique financé par des Partenaires Institutionnels Internationaux à l’égard de qui l’État avait des engagements fermes à respecter en temps et en heure;

L’évaluation des dommages causés au Sieur HAIDAR Hussein du fait de la mesure d’expropriation forcée a été faite par un Cabinet sérieux rigoureusement sélectionné par I’Etat de Côte d’Ivoire ; 

Que les conclusions de ce Cabinet en ont été que les montants à allouer au Sieur HAIDAR Hussein étaient de:

X Fcfa concernant le bien identifié PDRD/Y-GES 1/0018,

-et Y Fcfa concernant le bien identifié PDRD/Y-GES 1/0002;

Que ces montants ont été offerts au Sieur HAIDAR Hussein, qui a cependant saisi le Bureau des Plaintes pour les contester, sans cependant reparaitre pour soutenir sa contestation

Qu’en une telle occurrence, il est évident que I’Etat de Côte d’Ivoire ne pouvait être ainsi freiné du fait d’un seul particulier de mauvaise foi, dans la réalisation d’un projet d’utilité publique d’une importance particulièrement grande;

Qu’en une telle occurrence donc, le Sieur HAIDAR Hussein est mal venu à formuler les prétentions saisissant à présent la Juridiction de céans;

Que le Juge des référés déboutera le Sieur HAIDAR Hussein de I’ensemble de ses prétentions mal fondées »

OBSERVATIONS DU RJECI

A la lecture d’un tel argument pour demander au tribunal de ne pas considérer la demande du plaignant, on s’interroge si la Cc-Ptua a fait correctement son travail de façon professionnelle. Mais aussi si son conseil détient une petite dose de bonne foi.

En effet, dans la mise en œuvre des projets financés par la Banque Africaine de Développement (BAD), les clauses avec les Etats, exigent que les populations impactées par le projet soient d’abord dédommagées avant sa mise en œuvre. Ce qui n’a pas été le cas, puisque, en dehors du Sieur Haidar, bons nombres d’impactés dans cette zone continuent de courir derrière leur dû. Eux également, ont-ils disparu après leur recensement comme évoqué dans la plaidoirie de la défense ? Ou du moins comment procède la Cc-Ptua pour informer les intéressés à la discussion. Le conseil prétextant une quelconque disparition de la circulation du Sieur Haidar après sa plainte déposée à la cellule ne facilitant pas la mise en œuvre du projet sans toutefois préciser si elle a tenté l’approche de le rencontrer. C’est le Sieur Haidar qui devrait fixer à la cellule les agendas des rencontres de discussions ?

Aussi, le conseil évoque l’expertise d’un cabinet sérieux commis par l’Etat de Côte d’Ivoire (sentant l’Ageroute) dans l’évaluation des dommages causés au Sieur Haidar dans l’action de démolition de ses biens sans toutefois verser au dossier les éléments constitutifs permettant au juge d’apprécier l’ampleur des dommages causés à ce monsieur. Il en est comme ça pour bons nombres d’impactés à qui la cellule n’a pas laissé le choix de dire un mot même s’ils n’étaient pas d’accord avec ce qui leur avait été proposé comme indemnisation. Parce que les intéressés n’avaient aucune idée de la démarche à suivre dans ce cas de figure.

Pour mieux apprécier la situation dans bons nombres de contentieux qui oppose la Cc-Ptua, le Réseau des Journalistes Engagés contre la Corruption et l’Injustice (RJECI) a adressé plusieurs correspondances à la Cc-Ptua avec ampliation à la Commission d’Accès à l’Information au Document d’intérêts Publics (CAIDP) à l’effet d’obtenir les procès-verbaux des différentes opérations de démolition des biens. Jusqu’à ce jour aucun retour de la part de la cellule. Que cache-t-on donc ?    

Or le Sieur Haidar, contre-expertise à l’appui, demande réparation. Dans ces conditions, il donne fort argument au juge pour ne pas suivre la défense dans diversion, du moins dans sa requête demandant de débouter la demanderesse.

Dans une plaidoirie aussi simpliste sans démonstration aucune, ne saurait convaincre un juge. Car sans nommer le cabinet, réputé sérieux et présenter des images sans les commenter pour en donner une idée de la valeur du bien de l’impacté et surtout sans en faire la démonstration de ce que la contre-expertise de monsieur Haidar a été surévaluée, dénote tout simplement de la légèreté déconcertante avec laquelle les cadres de la Cc-Ptua et leur conseil abordent ce sujet de destruction des biens de la classe moyenne de la société sans aucun regret. Pour quelques millions FCFA en compensation aux biens acquis après plusieurs années de dure labeur, la Cc-Ptua estime que, pour cette classe moyenne, c’est suffisant. C’est d’ailleurs beaucoup d’argent pour plusieurs générations selon elle. Les bénéficiaires devraient donc s’en contenter ? Vraiment !

Mais pour les cas-ci portés devant le tribunal, la PTUA n’offre aucune autre alternative à un juge sérieux que de condamner l’État de Côte d’Ivoire à ses dépens.

Rédaction RJECI

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